Festival du Regard

Festival d'art photographique parisien






Françoise Evenou

Las Reinas del Bosque

Angelica, Estrella, Jessica, Maria, Melissa, Tily, Vanessa, ces femmes ont quitté leur pays d’origine, l’Equateur, le Pérou, l’Argentine, pour une vie meilleure, pour vivre librement au pays des Droits de l’Homme. Cinq, dix, vingt ans plus tard, on les retrouve dans leur Nouveau Monde… le bois de Boulogne. Elles sont transgenres, migrantes et se prostituent la nuit pour survivre.
Elles se tiennent discrètes, silencieuses, trônant à l’avant de leur camionnette garée dans les allées du bois, ou debout sur les trottoirs. Parées comme des reines de beauté, maquillées comme pour entrer en scène, poitrines vertigineuses enserrées dans un haut étroit.
Certaines travaillent la nuit, parfois le jour, uniquement le week-end, ou encore 7 jours sur 7. Quand tout va bien. Parce qu’il y a les maladies, les agressions, la fatigue, l’usure, les amendes. Et la Covid a empiré les choses. La concurrence est de plus en plus rude. Les clients sont plus rares. Il faut parfois attendre des heures dans le froid avant d’en apercevoir un, baisser les tarifs « On n’a pas le choix : il faut bien manger ». Pendant 18 mois, entre 2020 et 2021, plusieurs fois par semaine, de nuit comme de jour, Françoise Evenou est allée à leur rencontre. Pouvoir les approcher dans leur langue maternelle lui a permis de tisser avec elles un lien de confiance : « Je les ai photographiées et enregistrées. À chaque fois, j’ai été profondément touchée par leurs histoires de vie, leur force de caractère et leur dignité. C’est en écoutant leurs récits, en les transcrivant patiemment et en les traduisant le plus fidèlement possible, c’est en regardant encore et encore leurs portraits que le titre de la série m’est venu : Las Reinas del Bosque. J’ai donc cherché une couronne, celle qui t’irait le mieux, Melissa. Et puis je suis revenue. Quand je te l’ai montrée, j’ai vu tes yeux briller, ton sourire étincelant. Je savais.
Tu as dit : « Reviens plus tard, je veux me préparer comme une reine. » A travers cette série de photographies, d’enregistrements et textes, j’ai voulu donner une autre image de ces femmes, confrontées
à la nuit des hommes, qui luttent pour survivre et assumer leur identité avec dignité : Las Reinas del Bosque ».

Ecrivaine et photographe d’origine espagnole, Françoise Evenou vit et travaille à Paris. Après un parcours en entreprise, elle étudie la philosophie et la théologie à l’université. En 2014, elle publie son premier livre, La Rencontre, et se consacre depuis à l’écriture et
à la photographie. Le questionnement de l’identité et de l’altérité est au cœur de sa recherche.
Depuis 2017, elle approfondit sa pratique auprès des photographes Diana Lui et Klavdij Sluban. Son travail photographique explore le portrait de femmes, et cherche à exprimer l’expérience vertigineuse d’une rencontre et à saisir la psyché humaine.
Sa démarche artistique articule images, entretiens, enregistrements sonores et textes courts.
En juin 2021, son premier recueil de photographies et textes, La couleur du désir, est publié aux Editions Filigranes, Collection Punctum N°1 et présenté en juillet à la Galerie Huit Arles, durant Les Rencontres de la Photographie d’Arles. Elle travaille actuellement sur son nouveau projet, Las Reinas del Bosque, une installation de photographies, d’enregistrements sonores et de textes. Par ailleurs, elle anime un atelier « écriture et photographie » au sein de l’Amicale du Nid pour des jeunes femmes réfugiées ou demandeuses d’asile, victimes de violence et de traite.

Lieu d'exposition: Centre Commercial des 3 Fontaines – Cergy 3