Tina Merandon
Anima & Les Chiens
du 12 novembre au 29 décembre 2024.
Depuis la fin des années 90, Tina Merandon poursuit une recherche photographique qui l’a notamment amené à tisser des liens avec des territoires et leurs habitants. Du cirque au cercle familial, du milieu des lutteurs à celui des politiques, de celui de la chasse à celui du dres- sage, elle ne cesse d’explorer la confrontation sous différentes formes, allant de l’étreinte au combat, mais aussi celle qui peut se jouer entre la photographe et ses modèles. C’est le corps en action, voire le corps-à-corps qui l’intéresse. Dans son oeuvre, les animaux, occupent une place centrale comme en témoignent les deux séries que nous présentons: Anima met en scène des adolescents avec l’animal dont ils se sentent le plus proche. Quant à Les Chiens, Tina Merandon aborde la violence sauvage de l’animal, un sujet peu abordé, grâce à la complicité de dresseurs et dompteurs.
Compte tenu de son parcours et son talent à capter les relations entre humain et animal, le Festival du Regard a choisi la photographe pour mener un atelier photo avec les résidents du bailleur social Erigere. Les photographies réalisées en septembre seront exposées au festival.
Dans Anima, restitution de deux résidences* photographiques menées en 2014 et en 2021, Tina Merandon interroge la relation fusionnelle mais parfois contradictoire de l’adolescent et de son animal de compagnie. L’artiste s’attache à montrer combien cette relation est privilégiée bien qu’ambigüe. Être de réconfort et de communication, dans un langage muet, l’animal de compagnie occupe une place centrale dans le développement social de l’enfant. Il peut apparaître pour l’enfant comme une prolongation de son propre corps dans un mouvement omniprésent. Sauvagerie et domestication sont en question. Les gestuelles ainsi que toutes les formes de langages non verbales deviennent alors autant de signes évocateurs à capter. Le corps – à – corps, prend alors une forme particulière, étrange et familière. L’enchantement dirige l’ensemble: le merveilleux et la magie sont à retrouver dans ce dialogue singulier.
*Une résidence produite par la ville d’Aulnay – sous – Bois avec le soutien du Conseil général de la Seine – Saint – Denis en 2014. Et unerésidence territoire à Château – Thierry avec le SILO U1 et la mairie de Château – Thierry, soutenue par la DRAC et la Région Hauts-de-France en 2021 et 2022
Pour Les Chiens, il ne s’agit plus de mise en scène mais de travailler étroitement avec des dresseurs: «La pratique alliant violence et manipulation, comme en fauconnerie ou en dressage de chiens, est fascinante, confie la photographe Etre éleveur, dompteur, soigneur d’animaux sauvages ou marginaux, c’est faire partie d’un monde à part, un petit groupe assez peu reconnu. Essayer de dresser des êtres si différents de soi, pour l’attaque ou la fuite, relève d’une gageure incroyable et modifie le comportement des humains. Je suis tout simplement fascinée par la puissance physique de ces chiens, leur agilité, la vitesse de leur mouvement. Pour cette série, j’ai mis plus d’un an à trouver la forme à donner au travail. Le chien doit surgir du noir et se jeter sur le spectateur ou la spectatrice. C’est une vision nocturne fantasmée. Le chiens est un mammifère auquel je m’identifie facilement, auquel je prête des sentiments humains. Les dresseurs en Ile-de-France et en Normandie ont été faciles à trouver, le dispositif s’est mis rapidement en place. Un tissu noir est tendu derrière le chien tenu par une laisse à un poteau. Deux flashs sont directement braqués sur les chiens et se déclenchent lorsque ceux-ci bondissent sur moi, excités par le dresseur, collé à moi dans mon dos. Les molosses se jettent sur mon objectif, babines retroussés, toutes dents dehors. Par la suite, sur l’ordinateur je ferai disparaitre la laisse. Le temps de la prise de vue doit impérativement entre très court, le coeur des chiens ne supportant pas trop longtemps cette performance. Cette expé- rience a été très éprouvante pour moi. Je ressentirai plus tard un épuisement du même ordre dans la tension que celle qui s’est exercée quand j’ai travaillé avec des rapaces ».
Biographie :
Tina Merandon vit et travaille à Montreuil. Elle explore la relation à l’autre, les échanges et les confrontations qui sont un thème récurrent prenant la forme d’une chorégraphie improvisée. En perpétuelle recherche plastique, elle travaille la couleur et le langage corporel vers des formes abstraites ou graphiques. Tout est lié au corps, à la peau,
à la gestuelle qu’elle soit animale ou humaine. L’animal traverse toujours son corpus mais toujours en lien avec l’homme, la relation formant
le sujet central. Après une longue collaboration avec Libération puis
Le Monde, son activité alterne maintenant entre résidences, cartes blanches, ateliers pédagogiques auprès de différents publics. Tina Merandon est professeure, chargée de cours à la Sorbonne Paris1, option photographie. Nominée pour le Prix Kodak de la critique photographique en 1998, elle est lauréate du Prix Jeune Création 2003, Mention Spéciale Roger Pic en 2012, finaliste du Prix Nadar 2022.
Ses œuvres figurent dans les collections publiques telles que le Fonds National d’Art Contemporain, la Bibliothèque Nationale de France
et les collections du Musée Nicéphore Niepce. Aux éditions Loco,
elle a publié son livre Tisser sa toile en 202. Elle est diffusée par l’Agence VU pour ses archives.
Remerciements à la Galerie 127 et au Silo U1 de Château – Thierry.
https://tinamerandon.comLieu d'exposition: Le Carreau de Cergy